A la croisée des révolutions numériques

Generic selectors
Exact matches only
Search in title
Search in content
Generic selectors
Exact matches only
Search in title
Search in content

Interview : Le diagnostic médical au plus près du patient

Accueil 5 Actualité 5 Interview : Le diagnostic médical au plus près du patient

Le diagnostic médical au plus près du patient

« La miniaturisation change toute la chaîne de la médecine »

La société savante Aristote organise le 3 avril prochain un séminaire sur « Le diagnostic médical au plus près du patient ». Martin Rayrole, membre de la direction technique Optronique de Thales, et membre du projet Axel-MedTech, et co-organisateur du séminaire, revient sur les mutations technologiques en cours du diagnostic médical.

 

Pourquoi organiser ce séminaire ? Qu’est ce qui le justifie ?
Nous sommes à un moment charnière, pour tout ce qui concerne les technologies de diagnostic médical. Le domaine est en pleine mutation. Jusqu’à présent, dès que vous aviez un souci de santé, vous pouviez aller vous faire diagnostiquer dans un laboratoire d’analyse ou un centre d’imagerie, en radiologie. Ces centres ont des scanners, des appareils énormes, et si vous aviez besoin d’analyses complémentaires, vous alliez ensuite à l’hôpital. Mais deux grandes tendances viennent chambouler tout cela : la miniaturisation et l’IA. Les technologies évoluent pour rendre ces appareils bien plus petits, et à long terme, plus abordables. Ce qui changera totalement la pratique du diagnostic, qui ne sera plus restreinte à de hubs centralisés. L’autre tendance c’est l’IA, qui bien sûr, vient changer le processus d’analyse et aider les médecins à poser des diagnostics plus sûrs, plus rapidement.

Cela aura-t-il des conséquences sur l’organisation économique du secteur ?
Oui. Aujourd’hui, ce marché est trusté par quelques grosses entreprises internationales, et la France y est très peu présente. En dehors de quelques sociétés qui peuvent avoir de bonnes parts de marché sur certaines pièces de machines – comme Trixell, qui produit des panneaux pour rayons X, intégrés aux scanners – ces marchés restent très compliqués à pénétrer du fait de son organisation. Or, ces évolutions technologiques changeront beaucoup de choses. La miniaturisation permettra à nombre de praticiens de s’équiper, et changera donc la répartition des possibilités de diagnostics sur le territoire, et l’IA, ainsi que les nouveaux capteurs et le développement des réseaux sans fils, viendront bouleverser ce marché… Ainsi, il y a un coup à jouer, et la France se dit : c’est le bon moment pour s’insérer.

Comment s’organise-t-on en France ?
La France est plutôt bien garnie en termes de recherche académique, de jeunes pousses ou de TPE-PME, qui excellent vraiment dans leur domaine. Nous avons toutes les bases pour nous faire une bonne place. Mais il faut maintenant concrétiser. Pour cela, le CST « Industries et Technologies de Santé » a lancé la filière Imagerie Médicale et créé une nouvelle structure, Axel-MedTech, pour accompagner les start-ups depuis l’industrialisation jusqu’à l’accès au marché en passant par la stratégie règlementaire. C’est une structure d’un nouveau genre : une société coopérative à intérêt collectif. Elle regroupe des acteurs de nombreux domaines : des grands groupes, des hôpitaux, des laboratoires académiques, des syndicats, des jeunes entreprises… Le but est de croiser les regards et les moyens pour aider les bonnes idées à prendre de l’ampleur. Car en France, nous avons beaucoup de soutiens pour démarrer et faire émerger les bonnes idées : des incubateurs, parfois au sein même des universités, des aides de l’Etat… Mais le passage à l’échelle industrielle reste une étape difficile.

Donc nous sommes vraiment à la croisée des chemins ?
Oui, il y a la combinaison de facteurs technologiques qui changent le marché, et économiques, avec la volonté de s’organiser pour s’y insérer et se faire une bonne place. Nous devons mettre tout le monde autour de la table, et travailler ensemble, pour pas qu’une entreprise tire la couverture de son côté. Chez Axel-MedTech par exemple, chaque sociétaire à une voix. Nous voulons vraiment travailler en mode coopératif. Avec des industriels, comme Thalès, qui ont des compétences internationales, et savent gérer des grands programmes ou des chaînes de production complexes. Il faut que tous les acteurs échangent entre eux pour savoir répondre aux problématiques de chacun.

Ce séminaire s’inscrit dans cette veine ?
Oui, totalement : le but est de se tenir au courant de tout ce qui se prépare, et de comprendre les perceptions et enjeux de chacun. Le séminaire est organisé en deux temps : une présentation des besoins et des axes de recherche le matin, avec les médecins, les hôpitaux, les universités, et une présentation des nouvelles solutions que préparent les entreprises l’après-midi. Nous avons eu le choix, car le secteur est vraiment foisonnant, alors nous avons tenté de varier les approches et les enjeux pour avoir la vue la plus large et complète possible. L’autre point très important c’est aussi ce que tout cela aura comme incidence sur l’approche générale de la santé. Car ces nouvelles technologies accompagnent le “virage ambulatoire”. Aujourd’hui, le patient se déplace pour aller chez les médecins, mais avec la miniaturisation, c’est la médecine qui ira au patient. Nous entendrons par exemple la société Chipiron, qui a réussi à développer une IRM portative, qui se branche sur une simple prise de courant : c’est une révolution. Idem avec eDaisy qui développe un dispositif portable pour diagnostiquer le cancer du sein de manière plus sûre et moins invasive grâce aux micro-ondes.

Cela change l’approche de la médecine pour les praticiens ?
Avec l’IA, en plus, oui ! Cela obligera à s’adapter, à parler différemment avec le patient. C’est pourquoi nous avons invité aussi Sorbonne Université, avec la présence de Bertrand Granado, qui est directeur de l’Ecole Doctorale. Cette université est présente dans tous les domaines, mais aussi responsable de la formation de médecins, pour comprendre comment tout cela est intégré dans leur formation. En ouverture, un sociologue viendra nous parler de l’impact de la télémédecine sur le lien médecin-patient. Car il ne faut pas oublier que tout cela n’a qu’une visée : améliorer les conditions pour le patient, et donc il faut aussi appréhender comment il le ressent.