« POLICE SCIENTIFIQUE ET PSYCHOCRIMINOLOGIE :
QUAND LA SCIENCE DÉMÊLE L’HUMAIN »
COORDINATION SCIENTIFIQUE
Xavier Louis (IFSTTAR)
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Florent Gathérias (Direction Centrale de la Police Judiciaire)
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DATE & LIEU
Jeudi 19 mai 2016
8h45 - 17h45
École Polytechnique,
Amphithéâtre Becquerel
91120 Palaiseau
Organisateurs et partenaires
PROGRAMME
Accueil & café
Florent Gathérias
14h00-15h00
ACTE DU SÉMINAIRE :
L'APPORT DE LA PSYCHOCRIMINOLOGIE DANS LES ENQUÊTES CRIMINELLES | FLORENT GATHÉRIAS
Les enquêtes criminelles ont évolué depuis deux cents ans. La procédure inquisitrice, héritière de l’ancien régime, s’est développée d’abord sur la notion d’aveux. Le XIXème siècle a vu le développement de la preuve scientifique, jusqu’à l’utilisation quasi systématique des traces génétiques de nos jours. L’utilisation de la psychologie est devenue un complément indispensable pour certaines affaires pour lesquelles la compréhension de la motivation de l’auteur, ou de sa relation avec sa (ou ses) victimes, sont nécessaires pour son arrestation et pour la procédure judiciaire. Les auditions des auteurs comme des victimes, sont par nature empreintes de mécanismes psychologiques pour lesquels une technicité et un apprentissage sont essentiels pour une meilleure efficacité. La psychocriminologie est ainsi une science humaine qui a fait son apparition il y a quelques années et qui facilite le travail des enquêteurs de police judiciaire. Quelques exemples pratiques permettront d’éclairer l’apport de cette science, avec une spécificité supplémentaire pour les crimes sériels, que ce soient des crimes de sexe ou des crimes de sang. La psychocriminologie s’insère maintenant dans la diversité des assistances à l’enquête judiciaire, ayant comme objectif l’obtention de preuves opposables juridiquement. L’assise scientifique est une garantie indispensable à la constitution de la vérité juridique.
L'IDENTIFICATION DES CRIMINELS : SAVOIR INTERPRÉTER LES PARADES D'IDENTIFICATION ET LES ANALYSES ADN POUR EN DÉJOUER LES PIÈGES | SAMUEL DEMARCHI
Donner une identité à un criminel requiert une certaine prudence et un raisonnement rigoureux. Mais les travaux menés en psychologie expérimentale et en criminalistique montre que ce n’est pas toujours le cas. Par exemple, la séance d’identification est à l’origine d’au moins 50% erreurs judiciaires (Rattner, 1988 ; Wells et al., 1998), et peu de précautions sont prises pour s’assurer qu’elles remplissent bien leur rôle. Ainsi, en France, 90 % des parades d’identification présentent des biais majeurs à l’encontre des suspects, les plaçant dans une position défavorable par rapport à l’accusation. L’autre élément convaincant pour donner une identité est la preuve génétique. Mais, contrairement à ce que pourrait laisser penser le sens commun, elle ne permet pas d’incriminer une personne suspectée. Mais la qualité et la validité des analyses réalisées par les laboratoires ne sont pas remises en cause (ou très rarement). En revanche, les erreurs sont majoritairement liées à l’interprétation du rapport d’analyse, et plus particulièrement à la valeur proposée par l’expert (par exemple, “1 chance sur 2 milliards”). Les questions fondamentales qui en régissent l’interprétation sont « que signifie cette valeur ? Que peut-on en attendre ? est-ce nécessaire et comment la relier aux autres éléments de l’affaire ?
Lors de cette conférence seront abordés les différents biais de raisonnement qui conduisent à surévaluer la force probante fournie par l’analyse d’une trace d’ADN retrouvée sur les lieux d’un crime. Seront également abordés l’objectif d’une séance d’identification et le raisonnement qui permet d’évaluer la présence de biais. Diverses solutions fondées sur plusieurs dizaines de travaux expérimentaux et de terrain seront proposées.
LE RÔLE DU MÉDECIN LÉGISTE | DR ISABELLE SEC
LA POLICE TECHNIQUE ET SCIENTIFIQUE FACE AUX DONNÉES NUMÉRIQUES PROTÉGÉES | PASCAL PERENON
Le bras de fer récent entre le FBI et la société Apple est la conséquence d’une volonté des constructeurs d’appareils technologiques d’offrir une protection efficace des données privées de leurs clients. Les smartphones et ordinateurs récents proposent désormais à leurs propriétaires des systèmes de contrôle d’accès par mot de passe ou biométriques, et le chiffrement des données numériques.
Au cours de cette présentation, nous décrirons le principe de ces protections et aborderons certaines techniques avancées utilisées par le service central de l’informatique et des traces technologiques de la Sous Direction de la Police Technique et Scientifique pour accéder aux données.
LA QUESTION DE LA BANALITÉ DU MAL | DANIEL ZAGURY
Le psychiatre, à la suite de Karl JASPERS, maître d’Hannah ARENDT, peut-il mêler sa voix au débat sur la banalité du mal ? La réponse est positive, avec des arguments historiques, psycho-dynamiques et médico-légaux, notamment puisés à la clinique des tueurs en série, des génocidaires et des terroristes. L’antienne de la théorie situationnelle doit être corrigée à la lumière même de ce dont Hannah ARENDT a eu l’intuition : le vide de la pensée, condition du mal, ce que la clinique de la seconde partie du 20ème siècle a appris à décrire en termes de pensée opératoire, de carence élaborative ou d’alexithymie. Si Hannah ARENDT s’est trompée sur la personne d’Adolf EICHMANN, elle a par contre saisi toute l’importance du rapport entre l’absence de mentalisation et l’action criminelle. Ainsi peut-on sortir du balancement entre la démonisation (« Ce sont des monstres ») et la généralisation (« Tout le monde peut le faire dans certaines circonstances »). La barbarie des hommes ordinaires ne doit pas nous conduire à confondre banalité et généralité du mal.
Leur écosystème respectif justifiait que ces trois pôles puissent être force de propositions au sein du Conseil pour les Drones Civils (CDC), mis en place par la DGAC fin 2014, dont les Termes de Référence ont été validés par son Comité Exécutif le 4 juin dernier. Aujourd’hui, en complément à notre mission de base de pourvoyeur de dossiers de projets collaboratifs de R&D, nous agissons donc au sein des trois comités du CDC qui adressent les principales problématiques : la réglementation et les usages, les technologies et la sécurité des vols, le soutien et la promotion de la filière, le tout ayant pour but de la structurer, de l’industrialiser et de la soutenir à l’international.
Après un aperçu de l’existant, notre vision des principales technologies qui devraient être développées pour répondre aux besoins de donneurs d’ordres désireux de remplir des missions dans des conditions économiques et de sécurité acceptables conclura notre exposé.
L'EMPREINTE GÉNÉTIQUE : REINE DES PREUVES ? | MARIE-HÉLÈNE CHERPIN
L’identification des personnes à des fins judiciaires est une question qui date de la disparition de la marque d’infamie, ou tatouage au fer rouge des condamnés, abolie au milieu du XIXème siècle. Le début du XXème siècle a vu la mise en œuvre de l’identification par les empreintes digitales. Quasiment un siècle après (années 1990), la biologie moléculaire est venue révolutionner l’enquête.
Apparue à la fin des années 1980, la technique d’identification génétiques des personnes a connu un succès presque immédiat. Les progrès technologiques incessants permettent maintenant d’identifier une personne à partir de traces infimes dans un temps compatible avec une garde à vue. La sensibilité de la méthode est telle, que quelques centaines de cellules suffisent : un simple contact avec un objet, un postillon…
La création du Fichier National Automatisé des Empreintes Génétiques (FNAEG – 1998) rend désormais quasi obligatoire pour les enquêteurs le recours à l’empreinte génétique. Forte de ses immenses succès, l’identification génétique est-elle devenue la « reine des preuves » ?
Eh bien non ! Car l’ADN « ne parle pas » contrairement à ce que l’on entend parfois dans les média. Seuls les humains parlent et savant faire parler ; seuls les magistrats et enquêteurs savent replacer et ordonner les éléments d’enquête dont font partie les empreintes génétiques, pour arriver à comprendre et reconstituer la réalité des faits.
Element matériel à fort poids de conviction, l’empreinte génétique enrichit l’enquête mais ne la remplace pas.
L'ODOROLOGIE AU SERVICE DE L'ENQUÊTE | EFFY MANZONI
L’odorologie est une technique de comparaison et d’identification des odeurs humaines,prélevées sur des scènes d’infraction, utilisant des chiens spécialement éduqués. De nombreuses spécialités utilisent le chien pour ses capacités olfactives très développées, parmi lesquelles on peut citer la recherche de stupéfiants, d’explosifs et d’individus ensevelis (chiens de décombres et d’avalanches), le pistage, ou encore la détection de maladies comme différents types de cancers.
Contrairement à ces activités, axées sur la détection, l’odorologie est une méthode d’identification.
À ce jour, le groupe odorologie du Service Central d’Identité Judiciaire (SCIJ) de la Sous-Direction de la Police Technique et Scientifique est la seule entité qui pratique la technique de l’identification des odeurs humaines en France.
LA FOUILLE DE DONNÉES EN (CYBER)CRIMINOLOGIE | JEAN-PAUL PINTE
Les événements de janvier et novembre 2015 et ceux récents de Bruxelles en mars 2016 ont remis au devant de la scène l’urgente nécessité de scruter la toile pour aller vers une veille de plus en plus prédictive.
Peut-on cependant réellement investir ce domaine pour en retirer avant ou après les actes criminels, des informations stratégiques pour des investigations ?
Certains cimetières de pages Web et autres lieux d’interactions entre personnes comme les réseaux sociaux méritent d’être observés en profondeur pour en retirer l’ADN numérique de certains (cyber)délinquants.
Sur le terrain qu’en est-il ? Quels sont les moyens et les outils pour accéder à ces espaces pourtant presque accessibles à tous ? Peut-on vraiment cartographier le (cyber)crime ?
Autant de questions auxquelles cette communication tente de répondre avec, à l’appui, des exemples concrets de veille stratégique d’investigation criminelle.